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La Danseuse

La piste de danse était presque vide. Seuls quelques têtus continuaient à se déhancher malgré les fines gouttes de pluie qui détrempaient leurs habits.

C’est alors que je la vis vider d’un trait son verre de tequila et se lever pour les rejoindre. Ma danseuse.

Elle bougeait comme si un esprit avait pris possession de son corps. Jamais je n’avais autant été captivé par un aussi simple spectacle.

Les regards des autres spectateurs ne renvoyaient que mépris. Sans doute la trouvaient-ils trop aguicheuse. Pensaient-ils qu’elle était à la recherche d’une histoire sans lendemain, d’un corps contre lequel elle pourrait se lover après l’amour ?

Quant à moi, je la trouvais belle, insouciante, libérée. Rien ne lui importait d’autre que les mouvements de ses bras, de ses jambes, de ses hanches si sensuelles. Elle semblait vivre dans un autre monde.

 

Le tissu humide de sa robe plaqué contre ses courbes féminines me laissait imaginer des scènes voluptueuses, où nos corps se seraient complétés en une étreinte passionnée, mais elle ne paraissait pas penser une seule seconde à l’effet qu’elle pouvait provoquer par sa danse endiablée.

J’observais les gouttes de pluie qui ruisselaient sur sa peau telles des perles exécutant un ballet aquatique. J’étais comme hypnotisé.

Je ne sais pourquoi je ressentais dans chacun de ses pas comme une invitation à quitter ma chaise. Je n’avais qu’une envie, celle de m’approcher d’elle, de prendre ses mains dans les miennes et de plonger mes yeux dans les siens. Ma captivante danseuse.

 

Malheureusement, la soirée se termina bien trop tôt et la musique cessa soudainement. La demoiselle tourna la tête vers le public assis comme si elle cherchait quelqu’un et son regard me transperça. Savait-elle que je l’avais admirée durant de longues minutes ? Comment avait-elle perçu mon regard sur elle ?

Mon cœur manqua un battement lorsqu’elle me sourit. L’innocence que je lus sur son visage me décida à venir lui parler. Ce ne fut que lorsqu’un homme vint déposer un tendre baiser sur sa joue que je compris qu’elle appartenait à un autre.

Elle n’était plus ma danseuse.

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